mercredi 20 juin 2007

Quintessence


Jimmy Cobb : "Si Bill voulait la ramener au cours d'une discussion, Miles lui demandait aussitôt de la fermer, en ajoutant qu'il n'avait rien à foutre des opinions des blancs ; ça démolissait Bill, parce qu'il ne savait jamais si Miles plaisantait ou non."
En réalité, Miles Davis adorait Bill Evans et le charriait sans cesse. C'était l'époque du fameux "Kind of blue", sans doute le plus grand disque de l'histoire du jazz, et tranquillement, modestement et sans ostentation, Bill Evans était en train d'inventer le jazz modal.
L'apport d'Evans au piano est de la même ampleur que celui de Coltrane au saxo ténor. Peu de pianistes échappent à son influence (Herbie Hancock, Keith Jarret, Chick Corea, Steve Kühn, Michel Petrucciani et j'en passe !), quant aux stars actuelles du piano jazz, Brad Mehldau et compagnie, ils ne sont rien d'autre que des clones du grand Bill. Le seul pianiste de la même époque ayant eu autant d'influence est McCoy Tyner, dont le jeu est modal lui aussi, mais qui ne joue pas du tout le même genre de jazz. Autant le jazz de Tyner est novateur et varié, ouvert sur les musiques du monde, autant celui d'Evans est classique ; c'est le jazz des standards et, quand il compose, il n'est jamais avant-gardiste : il crée de nouveaux standards.
La musique de Bill Evans n'attire pas l'oreille, vous pourriez l'avoir en musique de fond sans le remarquer, mais si vous l'écoutez vraiment vous serez émerveillé et fasciné : si Debussy avait vécu à cette époque et avait joué du jazz, il aurait pu sonner comme Bill Evans.
Pour terminer, je laisse la parole à Miles Davis qui a toujours la langue bien pendue pour parler de ses collègues en bien comme en mal : "Son approche de l'instrument, le son qu'il en tirait, c'était comme des notes de cristal, une eau pétillante tombant en cascade d'une chute limpide."
Voici un standard : The peacocks (1977) qui illustre à merveille les propos de Miles. Détendez-vous, fermez les yeux et décollez.

1 commentaire:

  1. Mysterio Jazz, le blog qui rend moins con. Le blog qui lave plus noir. Le blog qui fond dans la bouche, pas dans la main.

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